La nuit de la parole (2023) - Deborah Puccio-Den Écouter le silence ISBN 978-2-36519-043-5 - 192 p. / 12 € Les cinq scènes qui se jouent dans ce livre répondent à deux questions : comment scruter ce qui n’est pas dit, ne s’entend pas, ne se touche pas, ne se voit pas, se cache ? Quoi de commun entre un bal de carnaval slave, la procession d’une Vierge andalouse, l’omerta mafieuse, la rêverie d’un juge cloîtré et la kizomba, danse en banlieue parisienne ? Interrogeant le mutisme de différentes sociétés, l’auteure en découvre la trame commune : les conceptions de la nuit et de son pouvoir métamorphique. La nuit possède une force d’action foudroyante, et, cachée sous nos logiques apparentes, les fait voler en éclats : comme elle, le silence révèle la possibilité de transformer notre vision du réel et nos modes de connaissance ; il dévoile une autre face du monde, des croyances et des habitudes sous-jacentes, redoutées ou interdites, conscientes ou inconscientes, accouchant d’un corps nouveau, transformant les objets, les hommes et les sociétés diurnes et parlantes. Le silence est une parole bousculée comme la nuit est une anamorphose du jour. Une anthropologie des sens est le terreau brûlant de ce travail : la reconnaissance impossible sous le masque, l’ouïe trompée par un silence canonique ou mafieux, une Vierge muette chahutée comme une femme, l’art domestique d’un homme perdu, le toucher drastiquement contraint d’une danse qui saisit le corps entier. Ce point crucial induit chez l’enquêtrice, observatrice et participante, une remarquable ethnographie du soi. Acheter |
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Que jamais le temps ne se brise (2023) - Brigitte Baptandier Voyage au mont de la Fleur, Huashan (Shaanxi, Chine) ISBN 978-2-36519-042-8 - 136 p. / 12 € Voici le récit d’un pèlerinage au Mont de la Fleur, Huashan, le pic sacré de l’Ouest, en Chine, qui doit s’accomplir la nuit : la montée inéluctable, dangereuse, effrayante dans l’obscurité, permet d’atteindre le sommet pour y assister au lever du soleil. L’épuisement des corps, l’abandon progressif du réel diurne au pouvoir de la nuit, les paysages et les êtres qui la peuplent, ouvrent aux sens qui s’altèrent un monde prodigieux de visions et de réminiscences. Le corps se fait montagne cosmique. Ce périple joue le passage de la nuit au jour et la traversée permet d’arriver à «  la perfection de son vrai moi » . Sous l’écriture sage de l’érudition se dessine ici le cœur d’une initiation, bouleversement qui a permis à l’auteure de revêtir le manteau de brocart des initiés. Tout au long de son cheminement, elle offre un jardin de citations poétiques et un ensemble foisonnant de préceptes, facéties, récits, mythes, recettes, médecines, etc. Pendant la montée, le lecteur ébahi se régalera du Dragon flambeau, de la Femme ténèbres, des démons et des fantômes, des ronflements de tigres et des berceuses, des odeurs de soupes et de simples ; il apprendra les nuits sans sommeil, comment repousser les rêves et ce qui fait de l’espace d’encre noire un simulacre de jour, propice à la méditation. La dynamique nocturne, créatrice de métamorphoses, est soutenue par des illustrations peignant le mystère et la beauté de la Chine ancienne. On se laisse porter par «  le voyage comme un nuage » (yunyou) et par la superbe écriture du livre, d’un extrême intérêt tant pour les sinologues que pour les curieux d’autres mondes. Acheter |
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Contre temps et marées (2019) - Boris Charcossey Pêcheurs hauturiers de Lorient en mer d’Écosse - 208 p. - ISBN 978-2-36519-028-2 / 12 € Voici un livre aussi beau que troublant : la vie des marins-pêcheurs, un rêve ou un enfer ? Connaissent-ils l’aube et le crépuscule ? Distinguent-ils la nuit et le jour ? Ou bien la pêche en haute mer d’Écosse les oblige-t-elle à des combats toujours perdus pour retrouver l’apaisement du cycle partagé entre le sommeil nocturne et les activités diurnes ? Le carnet de bord de l’auteur démasque, derrière le produit de la pêche, l’épuisement des esprits et des corps, soumis aux risques d’un métier dangereux que les hommes ne veulent pas quitter sauf dans leurs rêves. Le sommeil est déréglé par le jeu pervers des lumières nocturnes dans les cales enfoncées sous les flots. Dans le monde fermé des flancs du navire, il y a l’amitié, les complicités, de rares moments de délassement ; il y a aussi une extraordinaire hiérarchie dont les marqueurs sont inscrits dans l’espace du bateau, révélés par la sonorité et le ton des adresses et des ordres, manifestés encore par le degré du droit à la parole, les places à table, les moments partagés ou solitaires. L’auteur « apprend à déchiffrer le français du bord », le bruit des machines et le bruit de la mer... un mode de vie autre. Nuit contre jour, terre contre mer, rythmes biologiques bouleversés, nous saisissons, grâce au style incarné de l’ethnologue, des éclairs de gestes ou de paroles, pris sur le vif. L’horloge interne est détruite lorsque le cycle du temps n’est respecté que pour remonter les poissons. Un livre comme la nuit, chargé d’émotions. Acheter |
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Démons et merveilles (2018) - Laurence Caillet Nuits japonaises - 208 p. - ISBN 978-2-36519-025-1 / 12 € Tout nous parle de nuit, car nous sommes au Japon. Que l’on consulte les astrologues ; que l’on s’endorme dans le métro ; que s’entrouvre la terre qui laisse passer démons, esprits en colère, ou fantômes délicieux ; que s’allument les lanternes ou que brillent les lucioles, les frontières entre la nuit et le jour s’estompent et le monde des morts n’est séparé de celui des vivants que par un seul pont. Les illusions effacent un réel resurgissant dans des rituels qui, grâce à des pratiques du corps, des psalmodies, des théâtres, solidifient le monde pour un moment. Une explication surgit, aussitôt bousculée par une autre. Les ruses pour tromper les êtres dangereux ou s’approcher des dieux s’épanouissent, juridiques, rituelles ou ludiques. Jaillit, toujours recommencé, un mélange saisissant de religions et de concepts, de la Pénitence aux trois mille prosternations jusqu’aux humbles offrandes, bateaux de papier ou de paille. Cet auteur au savoir étourdissant conte en un style inventif et charnel le chant des crapauds, l’œil de Baku, le palais des rêves ou les calendriers subtils. Depuis des millénaires, empereurs, poètes, et tout un peuple, inventent ensemble les ombres et la lumière dans la nuit. Acheter |
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Un deuxième monde (2018) - Michel Adam La nuit des Kikuyu du Kenya - 96 p. - ISBN 978-2-36519-024-4 / 12 € Au premier plan de l’actualité nationale, les sept millions de Kikuyu, principal groupe bantou du Kenya, sont connus depuis l’insurrection mau-mau de 1952 qui aboutit en 1963 à l’indépendance de cette ancienne colonie britannique. Près d’un demi-siècle plus tard, Michel Adam fait une incursion dans l’intimité de l’obscur chez les habitants paisibles de la circonscription d’Othaya, au pied du célèbre mont Kenya. Évoquant la mémoire toujours vivante d’un passé récent, l’auteur s’attache à décrire les transformations de la modernité : des rituels qui s’effacent, un patrimoine festif dissous dans les antiennes des nouvelles Églises, les tressaillements des conflits sociaux contemporains. Mais il laisse avant tout la parole à la nuit : l’amour et les contes, la chasse et la collecte du miel, les fantômes et les sorciers. L’aube et le crépuscule sont de faibles frontières entre soleil et lune qui se livrent un éternel combat. Accompagné par les illustrations de l’auteur, et guidé par un texte qui fourmille de notes précises et passionnantes, le lecteur voit la gazelle dik-dik, écoute l’engoulevent au crépuscule, sent le parfum des fleurs mellifères, goûte la garbure et (comme le disent les Kikuyu dans leur langue) « caresse les vaches ». Tout est dit avec la discrétion qui nous permet d’écouter chuchotements, non-dits et silence de cet « autre monde ». Acheter |
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La nuit pour apprendre (2014) - Laurent Fontaine Le chamanisme nocturne des Yucuna d’Amazonie colombienne - 144 p. - ISBN 978-2-36519-005-3 / 12 € Pour les Yucuna, la nuit libère les entités nuisibles en quête de proies. C’est pour cela qu’elle n’est pas faite pour dormir, mais pour veiller et écouter les savoirs enseignés par le chamane. Grâce à tous les sens dont la nuit permet pleinement l’utilisation, la mémoire des paroles rituelles, des mythes, des incantations, peut s’amplifier. C’est à un parcours des pratiques quotidiennes et des profondeurs de la langue que nous invite ce livre. On y apprend l’origine des heures de repas aussi bien que les prières contre les maladies ; pourquoi le verbe « trancher à la hache » est celui qui décrit le miracle de la lumière dans l’obscurité de l’épaisse canopée ; comment on use de la morphologie arawak pour décrire les objets du monde. C’est au creux de la langue que Fontaine nous parle de la « poudre d’obscurité », celle qui se répand et qui enferme le monde : la nuit. Acheter |
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Ceux de la nuit (2014) - Marie-Paule Ferry Les sorciers tenda du Sénégal oriental - 78 p. - ISBN 978-2-36519-003-9 / 12 € Une inquiétude… une angoisse dans l’obscurité — c’est le domaine de « ceux de la nuit », êtres qu’on ne peut identifier car leur qualité de sorcier et sorcière se perçoit seulement par ses effets nocifs ou même létaux. Ce récit vif et souvent poignant décrit comment, principalement dans la société bedik du Sénégal, seul le malheur révèle la présence néfaste de figures incertaines ; les aveux, la rumeur ou les accusations les désignent comme « ceux qui mangent la viande », c’est-à-dire les dévoreurs d’âmes. Se protéger de l’invisible, voilà l’axe de cet ouvrage, exposant plusieurs cas de sorcellerie par la transcription de dialogues et d’actes pris sur le vif, enrichie de photographies, retraçant « ce qui se passe », comme des visions de l’intérieur de ces sociétés. Acheter |
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On dansait seulement la nuit (2011) - Guy Bordin Fêtes chez les Inuit du nord de la Terre de Baffin - 118 p. - ISBN 978-2-901161-98-1 / 12 € Être actif la nuit est un « art de vivre » chez les Inuit, en particulier ceux des hautes latitudes. Leur langue possède d’ailleurs un terme qui désigne spécifiquement « la veille nocturne jusqu’au matin ». Toute activité semble ainsi à même, au gré des saisons, de repousser autant que possible le moment de l’endormissement. Au-delà de leur spécificité rituelle, les nombreuses fêtes – avec leurs jeux, leurs chants et leurs danses – permettent à chacun d’être pleinement un unnuaqsiuti, un « être de la nuit ». Acheter |
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Une nuit d’épouvante (2011) - Jacques Galinier Les Indiens Otomi dans l’obscurité [Mexique] - 130 p. - 978-2-901161-97-4 / 12 € Dans le Mexique indien, les ténèbres sont le théâtre d’expériences sensorielles violentes. Les humains y sont confrontés au retour des ancêtres, à la résurgence de forces inquiétantes. Elles suscitent des « visions », rencontres fugaces avec ces entités qui envahissent tant le monde sauvage que l’espace domestique, et troublent les rêves et le sommeil. Chez les Otomi orientaux, la nuit appartient au féminin, « ce qui épouvante ». En conséquence, le chamane, « celui qui sait », découpe patiemment des cohortes d’idolos, représentant les « maîtres du grand noir » et leurs assistants, afin de négocier avec ces prédateurs de fragiles armistices, capables d’endiguer tous les crimes rituels qui menacent les humains. Ils font de la nuit un véritable laboratoire de recréation du vivant, et des Otomi les penseurs d’une étourdissante philosophie de l’obscurité. Acheter |
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Des nuits et des rêves (2011) - Anne-Gaël Bilhaut Construire le monde zápara en Haute Amazonie - 148 p. - ISBN 978-2-901161-95-0 / 12 € En offrant aux Zápara le rêve pour communiquer avec lui, le démiurge Piatsaw leur a donné les moyens de penser le monde, de retrouver la connaissance et la mémoire, et d’envisager l’avenir – la nuit permettant d’atteindre l’essence des choses. En Equateur, les Zápara recherchent désormais dans les visions oniriques les réponses aux questions que leur pose l’existence, qu’il s’agisse d’un accord politique à trouver ou d’un évènement historique à comprendre. Ancrée dans le quotidien, l’expérience du rêve est ainsi constamment interrogée par les Indiens Zápara pour faire face aux nouveaux défis de la mondialisation. Acheter |